
Un film de Kim Ki-duk
Mars 2010
Et si vos rêves étaient vécus inconsciemment par quelqu'un, si vos fantasmes se réalisaient par une tierce personne somnambule ? Ce n'est pas tant son fonctionnement qui intéressera le réalisateur coréen Kim Ki-duk mais la lutte de deux personnes qui subissent ce phénomène. En effet, après avoir rêvé d'un accident, Jin se rend sur les lieux de ce dernier et constate qu'il a bien eu lieu mais par l'intermédiaire d'une autre personne : Ran. S'ils s'endorment tout les deux, l'un exécutera ce que l'inconscient de l'autre suggérera, ils vont alors devoir gérer ce problème ensemble malgré le fait qu'ils soient le yin et le yang tant par leur personnalité que par leur histoire; Ran fuit son ex-fiancé qu'elle déteste, Jin traque celle qu'il aime et qui est parti.
On apprécie alors rapidement le réaliste et la cohérence présents dans le comportement des personnages, ils ne sont que trop communs et c'est par la puissance des sentiments qu'ils oseront tenter l'impossible. Pourtant, il est difficile de parler plus longtemps de réalisme dans un film qui mélange rêve, réalité, imagination et vision tout en restant dans une poésie de l'image et des émotions. Il est facile de s'y perdre mais on finit systématiquement par comprendre de quoi il s'agit et c'est alors au spectateur d'avoir son interprétation de la chose.
C'est aussi dans son montage qui ne mâche pas le moindre agissement à l'image, dans ses cadrages qui laissent supposer les sentiments des personnages et dans ses décors que toute la poésie du film se fait sentir, peut-être n'est-elle pas aussi évidente que dans certains plans de Bright Star mais ne serait-ce pas une caractéristique du cinéma asiatique ?
Malgré tout cette poésie rendue vivante par la diversité de ces manifestations, on regrettera que le rêve ne nous transporte pas plus loin. Il est vrai que les tournures que prend l'histoire sont, contrairement au cinéma hollywoodien, difficilement envisageables mais la répétition des rêves du même univers clos et le temps de réaction des personnages peuvent être deux facteurs rendant le film trop fermé, concentré sur un unique sujet.
Même s'il est facile de lui reconnaître quelques défauts, Dream reste un long-métrage qui trouve aisément sa place parmi les bons films asiatiques contemporains aux côtés de The Chaser, Le bon, la brute et le cinglé, A bittersweet life et bien d'autres.